Le recyclage des batteries au plomb est peu réglementé au Cameroun. Une étude récemment menée par le Centre de Recherche et d’Education pour le Développement (CREPD) sur les sites de trois usines de recyclage agréées de Douala, au Cameroun, a révélé une contamination importante des sols à l’intérieur des usines et dans les zones résidentielles environnantes. La concentration moyenne globale de plomb dans le sol des 23 échantillons était de 22 952 parties par million (ppm ou 2,2 %), avec des concentrations à l’intérieur des usines allant jusqu’à 76 000 ppm (7,6 %). La contamination du sol par le plomb à l’extérieur des clôtures des trois usines testées variait de 17 000 ppm à 150 000 ppm (1,7 % à 15 %). L’une des trois usines n’avait pas de filtre à manches ou d’autre filtre à air apparent sur les émissions du four. Aucune des usines ne fonctionne avec des enceintes à pression négative ou une ventilation pour les processus de production de poussière ou de fumée. Il est urgent de combler les lacunes réglementaires relevées et le manque d’infrastructures adéquates dans ces usines pour protéger la santé publique et l’environnement.
Le recyclage des batteries au plomb est une industrie extrêmement dangereuse qui reçoit peu d’attention au Cameroun et dans d’autres pays africains. L’objectif de cette étude est d’évaluer la contamination potentielle des sols par le plomb à l’intérieur et autour des usines de recyclage de batteries au plomb agréées au Cameroun, qui sont toutes situées dans les périmètres de la ville de Douala.
Le rapport de l’étude (à consulter sur le site internet www.crepdcm.com) met à jour une étude menée en 2017 au Cameroun et dans six autres pays africains, qui a ensuite été publiée dans Environmental Research. (Gottesfeld, P, et al. 2018). D’autres études publiées dans d’autres pays africains ont également démontré que les usines de recyclage des batteries au plomb fonctionnent avec des émissions de plomb importantes qui entraînent une contamination des sols à des niveaux qui ont de graves implications pour la santé publique. Bien que les émissions dues au recyclage des batteries au plomb usagées soient un problème mondial, l’urbanisation rapide, l’augmentation du parc automobile et la demande croissante d’applications de stockage d’énergie de secours ont stimulé la croissance des industries de recyclage des batteries au plomb usagées dans de nombreux pays africains, dont le Cameroun.
Auparavant, nous avions documenté la contamination au plomb dans les communautés voisines hors site par les usines de recyclage du plomb à Douala. L’enquête de 2018 a permis d’identifier des niveaux élevés de plomb dans les sols autour des usines de recyclage de batteries au plomb agréées opérant à l’époque (METAFRIQUE Cameroon SA et BOCOM recyclage). Malgré des recommandations spécifiques pour améliorer les opérations et minimiser l’impact de cette industrie, le ministère de l’Environnement, de la Protection de la nature et du Développement durable (MINEPDED) a délivré des permis environnementaux pour deux nouvelles usines au Cameroun sans renforcer les exigences réglementaires en matière d’émissions environnementales.
Nous rendons compte de la contamination des sols par le plomb à l’intérieur, au périmètre et dans les quartiers environnants des trois usines de recyclage de batteries au plomb actuellement en activité au Cameroun. De plus, lors de nos visites sur place, nous avons constaté que les systèmes de contrôles de la pollution de l’air et de l’eau étaient inadéquats dans les trois usines.
Il est prévu que les résultats de cette étude soient utilisés pour éclairer la participation du Cameroun aux révisions des Directives techniques sur les déchets de batteries au plomb de la Convention de Bâle actuellement en cours d’examen. De plus, les conclusions de ce rapport peuvent aider le Ministère Camerounais en charge des questions environnementales (MINEPDED) à élaborer des réglementations nationales et des normes spécifiques à l’industrie pour traiter de la gestion écologiquement rationnelle des batteries au plomb usagées (BPU).
Les mesures urgentes à prendre au niveau national comprennent l’établissement d’un niveau réglementaire de plomb dans le sol pour les zones de résidence et industrielles, la limitation des niveaux de plomb dans l’air ambiant dans les usines de recyclage des batteries au plomb, l’exigence d’une ventilation adéquate et de contrôles de la pollution, des normes d’émission des cheminées et des limites sur les niveaux d’effluents d’eaux usées. Toutes les nouvelles usines devraient être tenues d’avoir une capacité de débit annuelle minimale afin d’assurer l’échelle nécessaire pour permettre et maintenir des contrôles environnementaux adéquats. Ces mesures sont nécessaires pour protéger la santé humaine et l’environnement de ces activités en cours. De plus, les concentrations importantes de plomb identifiées dans les sols nécessitent des mesures d’assainissement pour protéger ces communautés.
Alors que l’industrie des batteries au plomb en Afrique continue de se développer, on s’attend à ce que le nombre et la taille des usines de recyclage des batteries au plomb augmentent pour répondre à la demande prévue. Il y a un besoin immédiat de s’attaquer aux expositions continues dans les communautés environnantes, aux émissions de cette industrie et de réglementer les procédures de financement des opérations de fermeture de sites pour s’assurer que nous ne laissons pas derrière nous un héritage de contamination au plomb qui aura un impact sur les communautés à travers l’Afrique.
Les résultats de cette étude peuvent contribuer aux efforts en cours visant à mieux informer la Convention de Bâle dans le processus de révision des Directives techniques désuètes pour cette industrie. L’ampleur de la contamination identifiée suggère également qu’il est nécessaire de renforcer le cadre réglementaire au Cameroun et dans d’autres pays africains.